Réflexion sur l’aérodynamique des sellettes

La recherche de l’augmentation des performances en parapente passe en partie par la chasse à la traînée :

Amélioration des rendements des profils par l’amélioration du ratio portance/traînée

Diminution du vortex de bout d’aile

Diminution du métrage de suspentes (4 -> 3 -> 2 lignes)

Diminution de la traînée pilote par le passage assis à couché, sellettes à cocon et profilage des sellettes.

Mais quelle est l’influence des ces différents paramètres ?

A un régime de vol à finesse max, la trainée est en gros divisée ainsi :

50% de traînée induite (liée à la portance du profil)

50% de traînée de friction réparti à peu près en égale proportion entre la traînée de friction du tissus de la voile, les suspentes et le pilote. ( la surface de 250m de suspente de diamètre moyen 0.8mm est égale à 0.2m2, soit environ l’équivalent d’une sellette de compétition moderne telle qu’elle a pu être mesurée en soufflerie.)
A plus haute vitesse, la traînée induite va décroître (la portance diminuant), alors que les autres types de traînées vont augmenter avec le carré de la vitesse, mais sans que l’on connaisse exactement leurs proportions.

Ainsi la traînée pilote représente environs 20-25% de la traînée totale d’un parapente.
En émettant l’hypothèse qu’il soit encore possible de réduire cette traînée de 50% (soit une traînée équivalente à une surface de 0.1m2) on pourrait donc théoriquement gagner 1 point de finesse sur une voile de finesse 10.

Mais dans les faits, le passage de la position assis à une position couchée (en théorie le passage d’une surface estimée à 0.35m2 à 0.2m2) soit un gain théorique de traînée de 40%, ne s’est pas soldé par le gain théorique en finesse équivalent.
De même, depuis l’apparition de certains modèles profilés à l’arrière n’a pas eu de conséquences nettes sur le gain de performance, alors que la traînée de culot est clairement l’élément pénalisant en aérodynamique.

Nous avons donc souhaité en savoir plus, mais n’ayant pas les moyens de lancer une campagne de test en soufflerie de grande envergure, nous sommes partis sur la voie de la simulation numérique, sans se faire d’illusion sur la valeur effective des résultats obtenus, mais plus en pariant sur leurs qualités comparatives.

Plusieurs formes de profilages ont été dessiné. Les résultats avaient pour but à la fois l’étude de la traînée générée par ces formes, au niveau global, mais aussi la décomposition de celle-ci en portance/trainée induite.
Mais très vite s’est dessinée une autre piste, la polaire des ces formes. En effet, il ne sert à rien d’avoir la forme la pus aérodynamique possible, si on n’est pas capable de la maintenir à sa position optimum. Or en parapente, l’angle d’incidence varie en fonction du régime de vol de plus de 5°, et rien ne permet de contrôler notre assiette en l’air de façon précise et juste.

Des comparaisons entre des photos de fils posés sur une Kanibal Race actuelle et les écoulements obtenus en simulation montre que ces derniers sont clairement trop propres, mais pas complétement farfelus.

Les différentes formes modélisées sont les suivantes :

Kanibal Race actuelle.

Profilage en pointe comme on peut en voir en ce moment.

Profilage en étrave pour éviter d’avoir un profil porteur vers le bas.

Profilage de la tête et des épaules, avec différentes formes

Sans vous livrer les détails des résultats, par rapport à une Kanibal Race actuelle, il ressort que les profilages actuels en pointe n’apportent rien, en partie parce qu’ils ne traitent pas le problème, mais aussi parce que les écopes nécessaires à leur mise en forme compense leur faible gain.
Étonnamment, il semble que sur ces géométries actuelles, il soit bien plus intéressant d’avoir le flux d’air qui vienne du bas (d’une dizaine de degré, soit une assiette très plate), et non pas d’avoir le cocon bien aligné dans les flux d’air.
En effet, la zone clairement pénalisante étant le haut du corps, le cou, la tête et les bras, en ayant un flux qui arrive par en dessous, le corps du cocon « masque » cette zone pénalisante et améliore l’écoulement. Avoir les pieds qui pointent légèrement vers le bas est clairement catastrophique.
Donc arrêtez de vous moquer de vos potes qui ont les pieds au ciel, c’est eux qui ont raison !!

Il est clair également que le profilage propre des épaules, tête et du cou aide beaucoup.

Les profilages en étrave sont bons, mais très peu tolérant à l’angle d’attaque des filets d’air.

Il n’y a pas grand-chose à gagner à allonger inconsidérément la longueur du profilage. Ce qu’on gagne étant peut-être perdu en partie par l’augmentation de surface mouillée ?

Certaines géométries sont plus tolérantes que d’autres à l’orientation du flux d’air.

Au final, les gains potentiels maximums sont de l’ordre de 20% en ayant l’assiette optimale, sur les 20% de traînée impartis à la sellette. Soit 4-5%, donc sûrement encore moins en réalité. On parle donc d’amélioration de finesse de l’ordre de quelques dixième de point. Ce qui reste en enjeu non négligeable en compétition.